Un dernier voyage
Planète Zeus P - heure locale inconnue - 04/07/08
J'étais seul, confronté à mes sombres pensées. Une suite d'idées et de réflexions aussi glauques que l'endroit sordide dans lequel je me trouvais me traversaient l'esprit. J'étais recourbé sur moi-même. La pluie martelait la vitre si fort que j'avais l'impression de l'entendre résonner dans ma tête. C'était insupportable. Vite, quitter cet endroit maudit. L'odeur nauséabonde me donnait envie de vomir. Des corps en putréfaction gisaient non loin, à moitié ensevelis dans les immondices.
Soudain un cris déchira le calme de la nuit. Enfin. Plus besoin de rester cacher à présent. L'opération avait démarré. Celle-ci était plus importante que toutes les précédentes. Je ne pouvais partir comme ça. Arriver un beau jour sur cette terre et repartir aussi brusquement, tel un flash de lumière aveuglant. Non, hors de question. Cette opération, c'était mon hommage à l'Union Des Empires Gaïans.
Prestement, je saisis mes affaires et ouvrit la porte branlante dans un grand fracas. La pluie me brouilla la vue, l'eau dégoulinait en cascade de mes cheveux longs. Je couru en direction du monticule rocheux, situé un peu plus loin. Arrivé là-bas, à bout de souffle, les poumons en feu, je m'étendais de tout mon long dans la boue. De là, j'avais une excellente vue sur les postes de défenses avancés de l'ennemi. Les attaques ont alors commencées. J'arrivais à peine trop tard. Une explosion ébranla la terre, qui trembla si violemment que des crevasses se formèrent ça et là sur le champ de bataille. Je fus secoué dans tous les sens, jusqu'à ce que ma tête heurte dans un bruit sourd le mur de pierre à côté de moi.
Le reste des évènements n'est pas clairement gravés dans ma mémoire. Je me rappelle juste avoir tenter tant bien que mal de me redresser, malgré le sang qui ruisselait sur mon visage. Après quoi j'ai crié mes ordres dans ma radio, qui furent comme les paroles d'un sourd tant le fracas de la guerre rendait inaudible le moindre de mes mots. Les soldats qui m'entourèrent ensuite ne sont que des images incertaines dans mon esprit. Il y eu d'autres cris, puis plus rien.
Lorsque je reprenais mes esprits, j'étais toujours allongé au même endroit. Je me suis relevé en maugréant. En contre-bas, l'attaque se poursuivait. Les missiles pleuvaient sur la planète déjà en bien piteux état. Ils étaient si nombreux qu'ils obscurcissaient le ciel. Chaque impact émettait une vive lumière bleue, très aveuglante. Des fissures terrassaient la planète de part en part, on aurait dit une toile d'araignée géante. Le coeur rougeoyant de ce monde était quelques fois visible dans les trou noirs causés par les armes nucléaires. Le spectacle était saisissant.
Tout à coup, un vrombissement se fit entendre. Sans que je sache pourquoi, un frisson me parcourut l'échine. Levant les yeux vers le ciel, je vis mon armada entouré d'un halo rouge, parcouru d'arcs électriques impressionnants. La flotte essuyait jusque là les tirs ennemis sans broncher, mais force est de constater qu'elle n'avait pas le soutien nécessaire. Elle vola en éclat comme une vitre brisée. Les débris s'éparpillèrent dans l'espace, avant de retomber lentement vers le sol. Machinalement, j'avais serré les mâchoires et contemplé la scène avec un regard perçant.
Je dus me faire violence pour détourner les yeux. Je n'avais que trop trainé ici. Sans la moindre expression sur le visage, je partis, laissant derrière moi d'innombrables colonnes de fumées noires.
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Plaine glacée de Noageddon - 20h10 heure locale - 10/07/08
J'avais préféré faire mes adieux à l'extérieur, malgré le froid qui paralysait mes membres et rendait chaque mouvement pénible. La splendeur du décor méritait bien ce dérangement finalement peu important. L'aurore boréale sillonnait le ciel, remplaçant les habituels nuages grisâtres. Ces émissions lumineuses était d'un bleu étincelant aux extrémités, tandis qu'au milieu le vert était prédominant. Ce phénomène avait toujours fasciné les hommes avec ces couleurs intenses. Quelle meilleure occasion de partir?
J'étais là, à moitié dans le monde du rêve tant le lieu était magique, sur les marches métalliques du vaisseau-mère. Devant moi, le sol enneigé s'étendait à perte de vue. Tous les Gaïans étaient présents, aucun ne manquaient à l'appel et cela fut un grand soulagement pour moi. Avant que je ne prenne la parole, les dirigeants de l'Union avaient déjà fait un pas en avant. Finalement, je n'avais pas de déclaration à faire, du moins aucune qui ne nécessitait de mots.
Solennellement, je descendis des marches et, à la stupéfaction des autres, m'agenouillais devant le peuple Gaïan. Des voix m'interpelèrent mais je suis resté ainsi quelques instants. Je m'enfonçais petit à petit dans la neige, au point d'avoir les vêtements trempés, mais quelle importance.
Je fus surpris lorsque quelqu'un vint près de moi et me força à me relever. Je sortis alors les présents de mon sac. C'était cela mon dernier discours. Pas besoin de parler inutilement. J'ai dirigé mon regard vers Cid, après quoi je lui ai donné un casque rouge des temps anciens. Il n'était pas fait pour s'en servir, c'était simplement un symbole, qui ressemblait d'une certaine façon au casque moldave. Pour Skinner, j'avais appelé une jeune femme, d'une beauté aussi grande que son courage, pour lui servir d'assistante en cas de besoin. Enfin, pour Red XIII, drago et RT, je leur offrais trois armures resplendissantes. Sur la plaque pectorale, des runes y étaient gravées, mais je leur laissais le soin de trouver leur signification. C'était des présents pour l'équipe dirigeante qui m'avait grandement aidé durant mon mandat.
Une autre personne était également là. Elle avait toujours été là. Potamogale était vêtu d'habits très sombres, contrairement à son habitude. Cela contrastait fort avec le blanc immaculé de la neige. Il avait lui aussi quitter l'Union, nos chemins ne pouvaient donc que se croiser à nouveau dans le futur. Il m'avait fait découvrir l'immensité de l'univers, des mondes et des communautés qui m'étaient inconnus jusqu'alors. De surcroit il m'avait aidé à mettre en place mon Empire. Tout ce que j'ai trouvé à faire, c'est lui serrer chaleureusement la main. Je savais que nos destins étaient liés.
Bien sûr je n'oubliais pas les autres Gaïans. Mon dernier cadeau, je leur léguais à tous. C'était mon Empire. C'était finalement bien peu mais cela représentait beaucoup pour moi. Toujours sans un mot, j'avais déjà fait volte-face et commencé à monter dans l'appareil qui m'emmènerait pour un dernier voyage lorsque je compris qu'ils attendaient tous que je prononce quelques mots. Ce que je fis malgré moi le sourire aux lèvres :
- J'espère avoir aidé l'alliance et l'avoir fait évoluer, c'était mon unique désir durant ces dernières années. J'ai fais du mieux que j'ai pu. Elle ne peut que continuer ainsi et devenir toujours plus puissante. Combattre à vos côté fut un véritable honneur. Pour tout ce que vous avez fait, merci.
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La porte du vaisseau se referma dans un silence glacial. Plus de retour possible désormais. La tristesse envahissait déjà tout mon corps. Une dernière fois, j'ai observé la ligne d'horizon avec un sourire forcé. Le vaisseau partit, laissant derrière lui une grande trace de fumée blanche dans le ciel. Il disparu progressivement au loin, passant par l'aurore polaire. Personne ne savait dans quelle direction il se dirigeait, mais quelle importance.